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Climat contre budget : quelle trajectoire est soutenable ?  

Quelle trajectoire de dépenses publiques permet d’assurer à la fois la soutenabilité environnementale et budgétaire de notre économie ? Dans cette note, nous montrons que les règles budgétaires européennes sont en l’état difficilement compatibles avec la transition, mais qu’une sortie totale des investissements climats du champ de ces règles n’est pas sans risque pour la soutenabilité de la dette publique française. Si une sanctuarisation partielle des investissements climats est peut-être souhaitable, elle n’est donc pas suffisante.

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Nos objectifs de réduction des émissions semblent difficilement compatibles avec le respect des règles budgétaires européennes. Atteindre un surplus primaire de 1,5 points en 2031 et avoir un niveau d’investissements publics cohérent avec la Stratégie Nationale Bas Carbone nécessiterait un effort budgétaire, grâce à une combinaison de redéploiements ou de baisses de dépenses, et de nouvelles recettes, compris entre 200 et 250 Md€, soit entre 6 et 8 points du PIB. Un tel effort ne pourrait se faire sans coupes drastiques dans des dépenses publiques essentielles et mettrait donc en cause l’acceptabilité de la transition.

Sanctuariser entièrement les dépenses climats pourrait apparaître comme une solution pour garantir la soutenabilité environnementale de notre économie, mais ne résout pas le problème de soutenabilité budgétaire. Sanctuariser les dépenses climats impliquerait de les sortir complètement du cadre des règles européennes et financer la transition uniquement par la dette. Mais, quelles que soient leurs finalités, les dettes publiques sont fongibles : un financement seulement par la dette risque de poser un problème de sa soutenabilité budgétaire à long terme.

Nous montrons que, dans plusieurs scénarios d’évolution des investissements publics climatiques, les sanctuariser dans leur intégralité pourrait conduire à une augmentation non négligeable de notre dette publique d’ici 2050. Dans un scénario optimiste, où l’État n’aurait pas besoin d’encourager l’investissement privé, la dette augmenterait à environ 135% du PIB en 2050 (voir Graphique ci-dessous), et avec un support de l’investissement privé, à au moins 147% du PIB en 2050. Ces estimations moyennes cachent par ailleurs une grande diversité de possibles, y compris des situations où le niveau de notre dette pourrait exploser.

À long terme, cependant, les soutenabilités environnementales et budgétaires se rejoignent. Les dommages climatiques impacteront aussi le niveau de la dette publique. À partir d’une estimation conservatrice des dommages climatiques, on peut estimer que ne pas réaliser les investissements additionnels nécessaires à la transition augmentera le niveau de la dette publique en 2050 d’au moins dix points, et probablement beaucoup plus au-delà.

Un financement de la transition entièrement par la dette ne suffira donc pas, mais il faut de nouvelles solutions pour assurer conjointement les soutenabilités budgétaire et environnementale.

Quelle trajectoire budgétaire compatible avec la transition ?

Lecture : Le Graphique montre l’évolution du niveau moyen de la dette publique en pourcentage du PIB dans quatre scénarios différents. Le scénario de référence considère que la France respecte les règles budgétaires européennes jusqu’en 2031 et que son déficit primaire se stabilise ensuite à 1,5 points, mais aussi réalise les investissements nécessaires à la transition. Le scénario avec dommages climatiques considère que ces investissements ne seront pas réalisés et ajoute, par conséquent, les dommages climatiques liés aux émissions au-delà de la SNBC. Le scénario Sanctuarisation – scénario bas imagine une stabilisation du solde structurel primaire à un niveau plus bas, 0,3 point en 2031, mais compatible avec une croissance progressive des investissements publics pour le climat. Le scénario Sanctuarisation – scénario haut reproduit cette approche, mais avec une montée en charge des investissements publics pour le climat plus rapide, avec un solde primaire à -0,5 points en 2031.

Source : I4CE (2024), DGEC, Commission Européenne, calculs des auteurs.

Cyprien Batut et Jonas Kaiser

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